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Les Chants de Maldoror: Isidore Ducasse, cmte de LAUTREAMONT

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Les Chants de Maldoror: Isidore Ducasse, cmte de LAUTREAMONT Empty Les Chants de Maldoror: Isidore Ducasse, cmte de LAUTREAMONT

Message  MrSonge Jeu 8 Oct 2009 - 16:51

Les Chants de Maldoror: Isidore Ducasse, cmte de LAUTREAMONT 9782080705280FS

Deux mots sur un génie oublié :

Isidore Ducasse est né de parents français, à Montevideo, le 4 avril 1846. Il vient en France en 1859 pour y poursuivre ses études, au collège de Tarbes puis au lycée de Pau, où il est interne. Il se rend à Paris pour préparer l'Ecole Polytechnique. A l'âge de 22 ans, sous le pseudonyme de Comte de Lautréamont, il publie à compte d'auteur le premier des Chants de Maldoror, un ouvrage en prose poétique, qui passe complètement inaperçu (août 1868). Le volume complet sortira durant l'été 1869. Puis, sous le titre Poésies, il publie encore deux fragments de préface pour "un livre futur" mais qui n'a jamais été écrit. Il meurt phtisique en 1870 à son domicile du 7 Faubourg-Montmartre. Son oeuvre a été exaltée par les surréalistes. Elle apparaît aujourd'hui comme une expression particulièrement intense du désespoir et de la frénésie romantiques.

Les Chants de Maldoror, texte très riche, d’un abord difficile, et aux interprétations multiples, semblent incarner une révolte adolescente où le monde de l’imaginaire paraît plus fort que la vie dite réelle. On se sent pris d'un sentiment de vertige à la lecture de Lautréamont. Il partage sa vision d'un monde en perpétuel mouvement. Dans son expression, l'artiste (dont la vision si personnelle semble bouleverser des mouvements tels que le naturalisme et le romantisme littéraire), communique au lecteur un certain mépris des situations et des personnages dont il nous rapporte l'expérience.

Résumé de l'oeuvre :

Maldoror incarne la révolte adolescente et la victoire de l'imaginaire sur le réel. Il est difficile de ne pas être pris de vertige à la lecture des Chants, dans ce monde en perpétuelle mouvance. On ne peut en dissocier le fond et la forme, le récit et le style et certaines pages font penser aux toiles les plus hallucinantes de Jérôme Bosch. Mais la révolte est dérisoire et Lautréamont use aussi de tous les procédés de distanciation pour se nier lui-même. Une veine bouffonne, qui contraste avec le « soleil noir » du satanisme apparent, traverse l'œuvre : parodie du naturalisme ou du romantisme le plus échevelé, lieux communs, apostrophes moqueuses au lecteur, ironie sarcastique... Toutes les formes d'humour sont réunies et marquent le mépris de l'auteur pour ce qu'il raconte. Capable des plus beaux poèmes, il en ricane et force le lecteur à en rire avec lui. C'est l'adolescent qui prend une revanche sur la misère humaine du siècle, en devenant le héros d'un conte où s'effacent les barrières qui emprisonnent l'homme. Dans le jeu, tout est permis : ardente ferveur, joyeuse férocité et métamorphose.

Le nom même du héros, Maldoror, est sujet à interprétation. On peut notamment y voir les mots « en mal d'aurore », « mal », « horror », « dolor » (douleur en espagnol, langue parlée par Isidore Ducasse, né à Montevideo en Uruguay). Ces noms font référence à la profonde noirceur du personnage et son amour apparent du « mal ».

Au début des Chants, Maldoror, le héros représenté sous une apparence humaine, incarne les misères et les angoissantes questions ontologiques de son créateur. Il nous apparaît "pâle, livide, le sang appauvri, la bouche livide, fiévreux". Sa lucidité paroxystique lui fait voir de manière exacerbée la souffrance de l'humanité, les guerres et les maladies qui la ravagent incessamment. Impuissant devant la tragédie humaine, il devient désespéré puis il déchaîne sa violence contre Dieu.
Maldoror devient alors un symbole infernal. Etre protéiforme, il se transforme en aigle, en poulpe, en grillon d'égout ou en cygne noir. Comme la bête de l' Apocalypse, il parcourt le monde et sa violence vengeresse envahit la surface de la terre. Le fantastique se mélange au lyrisme et aux envolées oratoires. La folie furieuse contamine les phrases et les strophes et le héros maudit omniprésent est là pour illustrer la terrible déclaration du premier chant : «Moi, je fais servir mon génie à peindre les délices de la cruauté.»

Alchimie délirante d'un esprit dément, sublime perle noire née d'un champ d'ordures, Les Chants de Maldoror demeurent l'une des rares traces de la fulgurante trajectoire d'Isidore Ducasse, mystérieusement foudroyé en pleine jeunesse. Sa mort, après son oeuvre illuminée, allait alimenter sa légende et le faire entrer dans le club très fermé des poètes mythiques.

Un extrait :

Vieil océan, ô grand célibataire, quand tu parcours la solitude solennelle de tes royaumes flegmatiques, tu t’enorgueillis à juste titre de ta magnificence native, et des éloges vrais que je m’empresse de te donner. Balancé voluptueusement par les mols effluves de ta lenteur majestueuse, qui est le plus grandiose parmi les attributs dont le souverain pouvoir t’a gratifié, tu déroules, au milieu d’un sombre mystère, sur toute ta surface sublime, tes vagues incomparables, avec le sentiment calme de ta puissance éternelle. Elles se suivent parallèlement, séparées par de courts intervalles. À peine l’une diminue, qu’une autre va à sa rencontre en grandissant, accompagnées du bruit mélancolique de l’écume qui se fond, pour nous avertir que tout est écume. (Ainsi, les êtres humains, ces vagues vivantes, meurent l’un après l’autre, d’une manière monotone ; mais sans laisser de bruit écumeux). L’oiseau de passage se repose sur elle avec confiance, et se laisse abandonner à leurs mouvements, pleins d’une grâce fière, jusqu’à ce que les os de ses ailes aient recouvré leur vigueur accoutumée pour continuer le pèlerinage aérien. Je voudrais que la majesté humaine ne fût que l’incarnation du reflet de la tienne. Je demande beaucoup, et ce souhait sincère est glorieux pour toi. Ta grandeur morale, image de l’infini, est immense comme la réflexion du philosophe, comme l’amour de la femme, comme la beauté divine de l’oiseau, comme les méditations du poète. Tu es plus beau que la nuit. Réponds-moi, océan, veux-tu être mon frère ? Remue-toi avec impétuosité… plus… plus encore, si tu veux que je te compare à la vengeance de Dieu ; allonge tes griffes livides, en te frayant un chemin sur ton propre sein… c’est bien. Déroule tes vagues épouvantables, océan hideux, compris par moi seul, et devant lequel je tombe, prosterné à tes genoux. La majesté de l’homme est empruntée ; il ne m’imposera point : toi, oui. Oh ! quand tu t’avances, la crête haute et terrible, entouré de tes replis tortueux comme d’une cour, magnétiseur et farouche, roulant tes ondes les unes sur les autres, avec la conscience de ce que tu es, pendant que tu pousses, des profondeurs de ta poitrine, comme accablé d’un remords intense que je ne puis pas découvrir, ce sourd mugissement perpétuel que les hommes redoutent tant, même quand ils te contemplent, en sûreté, tremblants sur le rivages, alors, je vois qu’il ne m’appartient pas, le droit insigne de me dire ton égal. C’est pourquoi, en présence de ta supériorité, je te donnerais tout mon amour (et nul ne sait la quantité d’amour que contiennent mes aspirations vers le beau), si tu ne me faisais douloureusement penser à mes semblables, qui forment avec toi le plus ironique contraste, l’antithèse la plus bouffonne que l’on ait jamais vue dans la création : je ne puis pas t’aimer, je te déteste. Pourquoi reviens-je à toi, pour la millième fois, vers tes bras amis, qui s’entr’ouvrent, pour caresser mon front brûlant, qui voit disparaître la fièvre à leur contact ! Je ne connais pas la destinée cachée ; tout ce qui te concerne m’intéresse. Dis-moi donc si tu es la demeure du prince des ténèbres. Dis-le moi… dis-le moi, océan (à moi seul, pour ne pas attrister ceux qui n’ont encore connu que les illusions), et si le souffle de Satan crée les tempêtes qui soulèvent tes eaux salées jusqu’aux nuages. Il faut que tu me le dises, parce que je me réjouirais de savoir l’enfer si près de l’homme. Je veux te saluer et te faire mes adieux ! Vieil océan, aux vagues de cristal… Mes yeux se mouillent de larmes abondantes, et je n’ai pas la force de poursuivre ; car, je sens que le moment est venu de revenir parmi les hommes, à l’aspect brutal ; mais… courage ! Faisons un grand effort, et accomplissons, avec le sentiment du devoir, notre destinée sur cette terre. Je te salue, vieil océan !

Première phrase :

Plût au ciel que le lecteur, enhardi et devenu momentanément féroce comme ce qu'il lit, trouve, sans se désorienter, son chemin abrupt et sauvage, à travers les marécages désolés de ces pages sombres et pleines de poison; car, à moins qu'il n'apporte dans sa lecture une logique rigoureuse et une tension d'esprit égale au moins à sa défiance, les émanations mortelles de ce livre imbiberont son âme comme l'eau le sucre.


Dernière phrase :

Il n'en est pas moins vrai que les draperies en forme de croissant de lune n'y reçoivent plus l'expression de leur symétrie définitive dans le nombre quaternaire : allez-y voir vous-même, si vous ne me voulez pas croire.


Mon avis :

Vous ouvrez cet ouvrage, ous jetez un coup d'œil sur le début et vous vous apercevez que vous êtes saisi d'un léger vertige : «Plût au ciel que le lecteur enhardi et devenu momentanément féroce comme ce qu'il lit...» Ça y est, vous êtes pris, ou repris, vous voulez en savoir davantage, vous vous enhardissez, vous devenez féroce, ce qui vous change de la lourde torpeur agitée de l'actualité. Court-circuit massif : après deux guerres mondiales, des massacres insensés et des tonnes de littérature, Isidore Ducasse, comte de Lautréamont, est plus présent, plus vif et plus énigmatique que jamais.
La lecture de ce chef-d'oeuvre n'est pas recommandée, elle est incontournable.
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Message  Morganne Dim 15 Nov 2009 - 17:05

"(Ainsi, les êtres humains, ces vagues vivantes, meurent l’un après l’autre, d’une manière monotone ; mais sans laisser de bruit écumeux)."

ca c'est sublime... je crois que j'aime bien ce qu'il a écrit.
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Message  MrSonge Dim 15 Nov 2009 - 17:57

Si tu n'as jamais lu de Lautréamont, non seulement je te conseille de lire ce bouquin au plus vite, mais je te l'ordonne ! xD
Vivre sans avoir lu les "Chants de Maldoror" c'est vivre à moitié... ^^
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Message  Curare- Sam 9 Oct 2010 - 15:06

MrSonge :Vivre sans avoir lu les "Chants de Maldoror" c'est vivre à moitié... ^^

Ainsi, MrSonge, je vis à moitié..
car je n'ai pas encore éprouvé 'ces champs des possibles'
Pourtant, Maldoror dors quelque part en ma deumeure..

Cependant, j'aurai peut-être quelques confidences à vous faire à propos de cette oeuvre,
Ayez le souffle entrouvert, MrSonge, sur le mystère bien gardé ...

Et puis.. si vous êtes sage..
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Message  Liven d'Eleissen Sam 9 Oct 2010 - 15:38

Un garçon de ma prépa n'arrêtait pas de me le recommander l'an dernier... De fait, il est sur ma "liste" de livres à lire, et je compte m'y mettre dès que possible, surtout après avoir lu la présentation que tu en fais ^^
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