Karnak Café

Karnak Café

En flânant dans une bibliothèque, le hasard m’a fait trouver un court roman de Naguib Mahfouz :
Karnak Café (Actes Sud)
Le récit se passe au Caire, dans le milieu des années 196O. Le pays vit encore dans la ferveur qui a suivi la révolution de 1952 et mis Nasser au pouvoir. Le narrateur fréquente le café Karnak où il retrouve des petites gens, trois étudiants, dont un couple d’amoureux, qui ont foi dans le régime. Il recueille leurs confidences et présente des destins individuels et l’état de la société.
Un jour, les étudiants disparaissent. Ils ont été arrêtés pour islamisme.
Ils reviennent, amaigris, éprouvés : leur innocence a été reconnue. Ils seront de nouveau emprisonnés pour communisme. Ces arrestations sont faites par des services spéciaux, en dehors de tout cadre juridique. Mahfouz nous montre comment l’arbitraire, les humiliations, la torture, le chantage vont détruire ces étudiants, leur faire perdre toute fierté : on les oblige à devenir indicateurs. Le couple est détruit par le viol collectif de la jeune fille. Leur ami se suicide en prison.
Le dernier chapitre introduit une note d’optimisme : le responsable qui a persécuté les étudiants
apparaît après trois ans de prison. L’épreuve l’a transformé, il prêche désormais la démocratie et le respect des droits de l’homme.
Ce roman a été écrit en 1971 ; quarante ans après, il nous fait mieux comprendre la nature du régime égyptien et la soif de liberté et de justice de la jeunesse. Il préfigure les manifestations de la place Tahrir. Il témoigne d’une lucidité et d’un courage remarquables.
L’écriture simple, fluide , l’empathie de l’auteur pour ses personnages donnent encore plus de force au propos de Mahfouz.

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tiens, j'ai vu ce roman dans une librairie. l'ai as acheté (j'ai un tas de livres à lire avant) mais faudra .
Je crois que le coté noir m'a un peu arrêtée, je lis en ce moment le roman d'un israélien et hum... gloups. Plongée dans els méthodes des services de renseignement... (le shinbet pas le mossad)

Il ne faut être arrêtée par le côté noir car ce récit exprime une vraie chaleur humaine et il y a l'écriture de Mahfouz.
Et puis ce livre est tellement un révélateur du régime policier égyptien. L'auteur, ayant reçu le prix Nobel, n'a pas été inquiété, mais il a subi une tentative d'égorgement de la part d'une islamiste. J'ajoute cela pour préciser le personnage.

Non, ça m'arrête pas dans l'absolu. Juste en ce moment où j'ai déjà des lectures pas très faciles...
Je ne me souviens plus très bien du style de ce que j'ai feuilleté, possible que je confonde avec un autre.

ferdi a écrit: L'auteur, ayant reçu le prix Nobel, n'a pas été inquiété, mais il a subi une tentative d'égorgement de la part d'une islamiste.

Je ne comprends pas : pourquoi une islamiste irait l'égorger alors qu'il s'en prend au régime de Nasser - pas du tout islamiste, au contraire ?

ce n'est pas parce que tu as un "ennemi" politique commun que tu es copain-copain, Paco !

Je ne connais pas l'histoire de cet auteur, mais bon, y'a des tas d'exemples d'écrivains, ou artistes maghrébins ou orientaux agressés par ce que j'appelle des cinglés, parce qu'ils dérogeaient simplement à une vision rigoriste de l'Islam (enfin, c'est l'argument avancé, pour moi c'est juste des cinglés prêts à prendre tout prétexte pour passer à l'acte).
Y'a une artiste algérienne qui a failli être brulée vive y'a quelques années à Marseille, je crois pour ce genre de choses...
Enfin, j'ai l’impression que ça s'est calmé depuis. C'était y'a quelques années, ça... En Algérie, ça ne rigolait pas avec le FIS...

Non seulement Mahfouz était opposé au système policier et arbitraire égyptien, mais il était aussi critique
envers les fondamentaux islamistes, ce que j'aurais dû préciser dans ma présentation. Il était, cela va de pair, préoccupé par la situation des femmes en Égypte.. Contre les sbires gouvernementaux, il était protégé par le prix Nobel, mais ce dernier ne le mettait pas à l'abri des islamistes bien au contraire !